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Endocardites infectieuses: physiopathologie, diagnostic et traitement

INTRODUCTION

L’endocardite infectieuse (EI) est caractérisée par des lésions ulcérovégétantes liées à la greffe sur l’endocarde valvulaire, plus rarement pariétale, ou sur une prothèse intracardiaque d’un micro-organisme, le plus souvent bactérien, véhiculés par le sang.

Il s’agit donc d’une atteinte infectieuse de l’endocarde qui va causer des dégâts essentiellement valvulaires, responsables d’une morbidité et d’une mortalité importantes, dominées par le risque d’insuffisance cardiaque et d’embolies d’origine cardiaque.

ÉPIDÉMIOLOGIE


Incidence

+  Maladie rare

+ 15 à 60 cas par million d’habitants/an

+  Prédominance masculine nette 60-70%

+  L’âge moyen = 50 à 55ans

Au Maroc

+  Incidence hospitalière = 3,5%

+  Moyenne d’âge = 27ans


ANATOMOPATHOLOGIE/PHYSIOPATHOLOGIE


La localisation au niveau de l’endocarde de microorganismes véhiculés par le sang produit au niveau valvulaire 2 types de lésions élémentaires : les végétations et lésions destructrices.
Les végétations
-Lésions de base de l’EI = amas fibrino-cruoriques (fibrine + plaquettes + macrophages + PNN + bactéries).
-Conséquences HD et évolution (très variables) : les petites végétations < 10 mm, peuvent « cicatriser » voire disparaître, les végétations plus volumineuses peuvent atteindre 2 à 5cm et gêner alors le jeu valvulaire ou → obstruction prothétique ou gêne le remplissage coronaire.
-Souvent, elles ↓ de volume au cours du traitement ATB et peuvent évoluer vers la fibrose et la calcification.
-Problème majeur = risque embolique (13 à 49%) : l’embolie peut être révélatrice de l’EI (AVC, ischémie aigue d’un membre) ou au contraire être silencieuse (20%), découverte par ex lors d’un scanner systématique
Les lésions destructrices
Au niveau valvulaire :
-Deux types de lésions, lésions « directes » (bords libres des valves) et lésions de jet (ex .perforation centrale de la grande valve mitrale par le jet infecté d’une IAo).
-Principale complication = insuf valvulr → IC congestive.
-Les lésions sont d’importance variable : simple érosion valvulaire, destruction valvulaire + imp., prolapsus, ou délabrements valvulaires causant fuite valvulaire sévère.
Au niveau sous-valvulaire : rupture de cordages ou exceptionnellement piliers mitraux → fuites valvul massives.
Tissu péri valvulaire : abcès péri valvulaire.
L’abcès périvalvulaire
-Un critère dc majeur d’EI et a une valeur pc péjorative.
-ETO +++ → dc avec précision.
-Complique préférentiellement les endocardites aortiques.
-Plus svt, il se complique de lésion du tissu conductif en cas d’abcès du SIV et peut se rompre dans une cavité cardiaque créant une fistule avec l’OG, le VG, ou les cavités droites, ou encore se rompre dans le péricarde.
-La présence d’un abcès périvalvulaire au cours de l’EI constitue le+svt un argument en faveur d’1 ttt chir rapide
Autres atteintes cardiaques de l’endocardite (plus rares)
-Péricardites : dans les endocardites graves et évoluées
-Myocardites ← micro-embolies coronaires infectées
-Atteintes coronariennes : exceptionnelle ← embolie ou exceptionnellement un anévrysme mycotique coronaire.
Atteinte de l’endocarde pariétal non valvulaire : non rare, traduit en général une atteinte endocarditique sévère → lésion de jet sur l’aorte ascendante dans l’endocardite aortique ou sur le SIV dans l’EI sur cardiomyopathie obstructive. Il est possible d’observer végétations sur la paroi de l’OD ds EI cœur droit et sur sonde pacemaker

DIAGNOSTIC POSITIF 


Signes cliniques
Syndrome infectieux :
-Fièvre : symptôme majeur, peu être masquée par ATB
-Peut être associée à un AMG et à une AEG.
-Splénomégalie (20 à 40 % des cas)
Signes cardiaques :
-Apparition ou modification d’un souffle cardiaque = 2ème signe majeur. Sans absence n’élimine pas
le diagnostic.
-Toute fièvre chez un sujet porteur d’un souffle cardiaque doit faire évoquer le diagnostic d’EI et
pratiquer des HC
Manifestations extracardiaques :
Signes cutanéo-muqueux (25% des cas)
-Nodules d'Osler « faux panaris d’Osler » (nodules rouges et sensibles sur la pulpe des doigts ou des
pieds).
-Lésions de Janeway (placards érythémateux indurés au niveau de la plante des pieds ou de la paume
des mains)
-Pétéchies (muqueuse buccale ou conjonctivales)
-Hémorragies sous unguéales.
-Fond d’œil = Taches de Roth (petites hémorragies en flammèche au centre clair) sur la rétine.
-Hippocratisme digital.
Manifestations articulaires ± myalgies
Parfois complication embolique révélatrice (AVC…)
Examens paracliniques
Ex d’orientation : non spécifiques et peuvent être absents.
-Anémie – Hyperleucocytose inconstante – ↑ VS et CRP
-Immuno : facteur rhumatoïde, hypergammaglobulinémie polyclonale, glomérulite à complexes
immuns circulants (hématurie microscopique, protéinurie).
Hémocultures +++
-1er ex de référence : isole germe responsable ds 80-90%
-3 à 4 hémocultures à une heure d’intervalle, pratiquées en cas de frissons ou de pics fébriles, avant
toute ATB
-Dans 5 à 20 %, HC restent négatives (ATB préalable++)
-Dans tous les cas et particulièrement dans les cas d’EI à hémoculture négative,
le diagnostic d’EI obtenu :
*Par sérodiagnostic (exemple : fièvre Q)
*Recherche du germe au nv PE ou foyer secondaire
*Par la culture de la valve prélevée, ou d’un matériel prothétique, d’un embole, d’une végétation.
*Par l’étude anatomopathologique d’un prélèvement.
ECG
-Souvent normal – Cardiopathies sous-jacentes
-Complications
*BAV = abcès annulaire aortique.
*Embolie coronarienne = signes myocardiques.
Radiographie pulmonaire
-Endocardite cœur droit : embolies septiques → opacités (cavitaires) multiples bilatérales.
Echocardiographie :
2ème ex de référence : ETT et ETO+++. Son intérêt est triple :
Diagnostique : combinée aux HC, affirme dc ds 90% des cas
-Végétation : masse échogène mobile présente dans 80%
-Abcès (ETO +++ > ETT) zone vide d’échos.
Pronostique :
-La sévérité des dégâts valvulaires et leur retentissement hémodynamique (DTDVG, FE/VG)
-L’évolution des végétations sous traitement médical. Surtout, la taille et 
la mobilité = marqueurs du risque embolique : élevé en cas de végétation mobile > 15mm.
Thérapeutique :
-Elément capital de la décision thérapeutique
-Bilan préopératoire précis des lésions et choix de l’heure et du type de chirurgie.
-En peropératoire (chirurgie réparatrice mitrale ou mise en place d’une homogreffe aortique)
Critères diagnostiques (critères de Durack) :
Endocardite certaine en présence de 2 critères majeurs ou 1 critère majeur et 3 critères mineurs ou 5
critères mineurs
Critères majeurs :
-Hémocultures positives
*2 HC+ à streptocoque non groupable, streptococcus bovis, bactérie du groupe HACEK, ou en
l’absence de foyer identifié, à staphylocoque ou entérocoque.
*HC positives persistantes au même organisme
-Sérologie Coxiella burnetti avec IgG en phase I ≥ 800
-Atteinte de l’endocarde : signes écho et cliniques
*Végétation – Abcès – Nouvelle fuite péri prothétique
*Clinique : souffle de fuite valvul d’apparition récente
Critères mineurs :
-Cardiopathie prédisposante ou toxicomanie.
-Fièvre > 38 °
-Phénomènes vasculaires : embolie artérielle, anévrysme mycotiq, infarctus pul, hém conjonctivale,
hém cérébrale.
-Phénomène immunologique (glomérulonéphrite, nodule d’Osler, tache de Roth)
-Critères microbiologiques mineurs : HC positive sans entrer dans la définition du critère majeur,
sérologie positive pour un organisme responsable d’endocardites.
-Critères échographiques mineurs : écho compatible sans entrer dans la définition du critère majeur.

DIAGNOSTIC DIFFÉRENTIEL 


Autres causes de fièvre chez les cardiaques.
RAA
Accidents thromboemboliques

-Thrombose des MI ou infarctus pulmonaire.
-Thrombose intra-auriculaire.
Endocardite de LIBMAN SACHS
-HC négatives, anticorps antinucléaires et anti-DNA
Myxome de l'oreillette gauche
-Formes fébriles, avec VS très augmentée, parfois, embolies systémiques. L'échocardiographie +++

<< Chez un sujet porteur d’un souffle cardiaque organique, toute fièvre inexpliquée persistante au-delà
de 8jours doit être traitée comme une maladie d’Osler >>

EVOLUTION ET COMPLICATION

Mortalité hospitalière : élevée 15 à 25 %
Complications cardiaques : les + graves et les + fréquentes
-Insuffisance cardiaque par fuite valvulaire majeur.
-Troubles de la conduction AV : ← abcès du SIV
-Abcès péri valvaires ou péri annulaires.
-Atteinte péricardique/myocardique - Embolies coronaires
Complications emboliques :
-2ème comp EI tant par leur fréquence que par leur gravité
-Tous les organes et tous territoires artériels peuvent être intéressés, prédominance cérébrale, splénique
et rénale.
Complication neurologiques :
-Abcès cérébral
-AVC ischémique ou hémorragiq (anévrysme mycotique)
Complications rénales :
-Infarctus, glomérulonéphrite, abcès, insuffisance rénale
Complications pulmonaires :
-Dans l'endocardite tricuspide (abcès et embolies)

TRAITEMENT 


A.Objectifs du traitement :

-Eradiquer le microorganisme présent dans les végétations afin d’éviter les rechutes.

-Prendre en charge les lésions cardiaques et extra-cardiaques afin de réduire la morbi-mortalité des E.I.

-L’ATB seule ne suffit pas. D’autres moyens (la chirurgie notamment) sont souvent nécessaires.

B.Traitement curatif :

Traitement médical

-Traitement antibiotique

*Précoce, massif, IV, continu et prolongé (4-6sem)

*Bactéricide, associant 2 ATB synergiques, adapté au germe (antibiogramme).

-Surveillance du traitement

*L'efficacité

-Cliniquement : apyrexie

-Négativation des hémocultures

-Disparition du syndrome inflammatoire

*Tolérance : surveillance de la fonction rénale (créat)

-Traitement de la porte d’entrée dans tous les cas.

Antibiothérapie en fonction du germe responsable :

Streptocoque 

-Péni G (20-30MU/j) + aminoside (gentamicine 3mg/kg/j ou nétilmicine 4-6mg/kg/j) x 15 jours puis la 

péni G est poursuivie seule pendant les 15 jours suivants.

-Si allergie à la pénicilline : vancomycine (10mg/kg/8h sans excéder 2g par jour)

Streptocoque non groupable – Entérocoque

-Péni G à fortes doses 

-De même l’ampicilline 12g/j + aminoside (15j).

-Durée de traitement = 6 semaines

Staphylocoque

Staphylocoque sensible à la méthicilline.

-Oxacilline 2g IV/4h x 4 à 6 semaines + aminoside (15j)

-Si EI/valve prothétique : ajouter rifampicine (300mg/j)

Staphylocoque résistant à la méthicilline

-Vancomycine x 4 à 6 semaines + aminoside.

Microorganismes HACEK et autres BGN

-Ampicilline (12g/j) ou CS3G (ceftriaxone) + aminoside 

-Durée de traitement = 4 semaines au moins.

Levures 

-Les candidas sont les + fréquemment rencontrés.

-Amphotéricine B (0,5-1mg/kg) + 5-fluorocytosine.

Traitement chirurgical :

-Indication hémodynamique : la plus fréquente

*Insuff cardiaque impose le recours à la chirurgie.

-Indication infectieuse : 

*Germes peu sensibles aux ATB 

*Foyer (valvulaire ou paravalvulaire) peu accessibles.

*EI à levures ou sur valve prothétique.

-Embolies systémiques : 

*Présence de végétation (>15mm)

*Nature du germe (candida, neisseria) ou (staph).

B.Traitement préventif

-Eradication de tous foyers susceptibles être à l’origine EI

-Hygiène buccodentaire

-Antibioprophylaxie si geste à risque chez cardiaque à risque 


                                               Cardiopathies associées à un risque d’endocardite



Endocardites infectieuses


FORME CLINIQUES


Les Endocardites prothétiques : jusqu’à 35 % des EI
Endocardites précoces, dans les 2 mois qui suivent l’intervention, staphylococcique, pronostic sévère.
Endocardites tardives : mêmes germes (que dans les EI sur valves natives), pronostic meilleur.
-Végétations sont fréquemment absentes
-Abcès périprothétiques plus fréquents.
-Hémocultures plus souvent négatives
-ETO > ETT (nouvelle fuite périprothétique)
-Traitement antibiotique doit être plus prolongé,
-Traitement chirurgical plus fréquent
Les endocardites du cœur droit
-Tricuspide+++, la valve pulmonaire exceptionnellement,
-Toxicomanes et les sujets immunodéprimés
-Favorisée/matériel étranger (pacemaker, cathéter perf…)
-Signes d’EP septique possible 
-Echographie : végétations, risque embolique important.
-Traitement : souvent médical, pronostic relativement bon

CONCLUSION 


-Si fièvre chez un cardiaque pas question de retarder le traitement en attendant le résultat des hémocultures.
-Antibioprophylaxie dans l’heure précédant un geste à risque chez un cardiaque à risque.

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